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Les communautés devraient avoir voix au chapitre en matière de résilience

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JOHANNESBOURG, 12 mars 2013 (IRIN) - Contrairement aux idées reçues, la majorité des populations rurales soumises à des chocs climatiques récurrents apprennent à s’adapter en s’appuyant sur leurs ressources et leurs connaissances. Bon nombre de programmes d’aide internationale font en effet appel à des « experts » qui vont concevoir des programmes d’intervention sans consulter les personnes à qui ils sont censés venir en aide.

Selon Simon Levine de l’Institut de développement d’outre-mer (Overseas Development Institute, ODI), bon nombre de projets de développement ne favorisent pas l’adaptation. Dans un message publié sur le blog d’Oxfam en 2012, il a dit : « La grande majorité de ces interventions, ainsi que les personnes qui les conçoivent et qui les mettent en œuvre, ne parlent jamais de "changement" ou d’"avenir" … Si l’on veut aider les populations à faire face au changement, il faut commencer par comprendre qu’elles ont leurs opinions, leurs préférences et leurs projets, qu’elles ont le droit de faire des choix, qu’elles ont le droit d’avoir les moyens de faire des choix éclairés. Elles n’ont pas tant besoin de compétences utiles aujourd’hui que de savoir où elles peuvent trouver les compétences dont elles pourraient avoir besoin demain ».

Certaines organisations non gouvernementales (ONG) interrogent les communautés sur ce dont elles ont besoin pour mieux s’adapter aux conditions environnementales et climatiques changeantes. Ces initiatives cherchent des moyens pratiques de mettre en œuvre la résilience tout en prenant en compte les forces, les mécanismes d’adaptation et les idées des personnes qu’elles sont censées aider.

Normes minimales

L’une de ces initiatives a été mise en œuvre par le consortium Partners for Resilience (PfR), qui rassemble CARE Pays-Bas, Cordaid, la Croix-Rouge néerlandaise, le Centre climatique de la Croix-Rouge/du Croissant-Rouge, Wetlands International et 30 partenaires de la société civile du Sud. Établi en 2011, le consortium PfR intervient dans neuf pays d’Afrique, d’Asie et d’Amérique centrale.

L’initiative, qui s’appuie sur l’interaction entre les communautés locales, les représentants locaux et nationaux des gouvernements, ainsi que d’autres partenaires, a dressé une liste des normes minimales pour aider les acteurs concernés à réduire les risques de catastrophes liées au climat.

La liste « ne vise pas de solutions idéalisées, mais des approches pratiques réalisables par des communautés disposant d’un soutien relativement limité », a expliqué Maarten van Aalst, directeur du Centre climatique de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge.

Selon les normes standards, une communauté doit au moins : être consciente que les risques climatiques futurs seront probablement différents de ceux du passé ; savoir interpréter les informations d’alerte précoce relatives aux chocs climatiques possibles et les utiliser pour s’adapter au niveau local ; être capable de mener et de mettre à jour régulièrement ses évaluations du risque ; et savoir s’adapter ou modifier leurs pratiques de subsistance existantes. Une communauté doit également créer un lien avec son agence météorologique et savoir faire part de ses besoins de soutien aux représentants du gouvernement et aux réseaux de changement climatique.

Renforcer l’adaptation

En 2009, un autre consortium composé d’ONG – incluant Oxfam, Care International, Save the Children, World Vision International et l’ODI – a créé l’Africa Climate Change Resilience Alliance (ACCRA) afin d’explorer la manière dont les interventions de développement peuvent permettre d’améliorer les capacités d’adaptation des populations.

L’ACCRA s’efforce d’analyser l’état d’esprit des communautés avant de définir les interventions. Elle examine la manière dont elles réagissent aux chocs, leurs dispositifs institutionnels locaux et leurs relations de pouvoir, ainsi que les réseaux sociaux capables de leur apporter un soutien.

L’ACCRA essaye également de les mobiliser sur des questions autres que les chocs et les catastrophes liés au changement climatique pour qu’elles prennent en compte les tendances à long terme, comme l’augmentation des prix alimentaires, la hausse des températures et la croissance démographique – des sujets qui nécessitent une prise de décision flexible et moderne.

Par exemple, l’ACCRA s’est associée au Centre climatique de la Croix-Rouge/du Croissant-Rouge, à la société Abaci et à Antidote Games pour concevoir un jeu encourageant les populations locales à prendre des décisions flexibles et modernes en réponse à des scénarios de changement climatique se déroulant dans le monde réel. Le jeu est utilisé dans les ateliers de recherche mis en place en Éthiopie, au Mozambique et en Ouganda.

« Notre méthode est [une méthode] qui s’appuie davantage sur le fait de donner aux institutions existantes des preuves et des connaissances pour élaborer une approche déterminée par la demande », a dit Saskia Daggett, coordinatrice au sein de l’ACCRA.

Les expériences que l’ACCRA a conduites dans trois pays – Éthiopie, Mozambique et Ouganda – depuis sa création lui ont permis de rassembler des preuves qui, elle l’espère, éclaireront les travaux des autres acteurs de l’aide.

Prise de décision au niveau de la communauté

La stratégie mise en œuvre par l’ACCRA semble fonctionner. En se basant sur le retour d’information des populations de deux districts de l’Ouganda, l’ACCRA a réussi à entretenir des relations constructives avec les communautés et divers échelons du gouvernement.

En réponse aux demandes des districts en matière d’informations climatiques, l’ACCRA a dépêché des météorologistes chargés d’expliquer les projections et les données climatiques. En créant des relations entre plusieurs structures gouvernementales, l’ACCRA a permis aux responsables de communiquer ces informations aux populations. Elles incluent la traduction en plusieurs langues locales d’alertes précoces relatives à la possibilité de faibles précipitations, puis la diffusion de ces alertes dans les médias, comme la radio et la télévision, et dans des brochures.

Ainsi, les communautés ont été mieux à même de faire face aux faibles précipitations. Étant donné qu’elles avaient déjà construit une relation positive avec les gouvernements locaux, elles ont été capables de faire part efficacement de leurs besoins, qui incluent les points d’eau, la plantation d’arbres et les semences améliorées. Grâce au retour d’information efficace et en temps utile de la communauté, les responsables des districts ont pu, à leur tour, élaborer des plans d’intervention et lever des fonds pour l’action gouvernementale, a dit Mme. Daggett.

D’autres districts sont prêts à s’inspirer de ces efforts. « Il y a une meilleure relation et une meilleure compréhension entre les communautés, les acteurs gouvernementaux et les ONG » ; a dit Mme. Daggett.

Les gouvernements et les ONG continuent cependant de privilégier une planification à court terme et réactive, a-t-elle ajouté.

Les traditions de certaines communautés entravent la prévention des catastrophes et l’adaptation au changement climatique. L’ACCRA a réalisé que, dans certains villages d’Éthiopie, l’innovation « était manifestement entravée par une culture dominante qui voyait d’un mauvais œil le fait de faire les choses différemment … Les personnes qui modifiaient les dates de semis ont fait face à une forte opposition », par exemple, en raison de l’évolution de la configuration des pluies.

C’est là que les acteurs du développement peuvent intervenir et apporter leur soutien aux personnes qui sont prêtes à innover.

Le message derrière ces nouvelles initiatives est que, comme l’explique un rapport de l’ACCRA, « Toutes les interventions de développement ont besoin d’une optique d’agence, c’est-à-dire qu’elles ne doivent pas seulement être pensées comme fournissant une infrastructure ou une technologie donnée, mais comme des véhicules permettant d’élargir les choix des populations ».

jk/rz-mg/amz