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Rapport du Rapporteur Spécial sur la situation des droits de l’homme au Burundi (A/HRC/51/44) (Advance Edited Version)

Pays
Burundi
Sources
UN HRC
Date de publication
Origine
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Résumé

Le Conseil des droits de l’homme, au paragraphe 20 de sa résolution 48/16 sur la situation des droits de l’homme au Burundi, a décidé de nommer un rapporteur spécial chargé de surveiller la situation des droits de l’homme au Burundi, de faire des recommandations pour l’améliorer, et de recueillir, d’examiner et d’évaluer les informations provenant de toutes les parties prenantes concernant les droits de l’homme au Burundi. Au paragraphe 21 de la résolution, le Rapporteur spécial est prié de présenter au Conseil, à sa cinquantième session, une mise à jour orale de la situation des droits de l’homme au Burundi, et de lui soumettre, à sa cinquante et unième session, et à l’Assemblée générale, à sa soixante-dix-septième session, un rapport écrit complet.

I. Présentation et contexte du mandat

A. Contexte général

  1. Depuis son accession à l’indépendance, le Burundi a connu des violences cycliques caractérisées par des coups d’État répétés, des luttes intestines et des affrontements civils. Les plus importantes sont survenues en 1965, 1969, 1972, 1988, 1991, 1993 et 2015. La crise de 1993 a abouti, sous l’égide de Nelson Mandela, à l’Accord d’Arusha pour la paix et la réconciliation au Burundi, signé le 28 août 2000 à Arusha, en République-Unie de Tanzanie. Cet accord, qui est entré en vigueur le 1er novembre 2001, a identifié de manière consensuelle la nature et les causes des conflits au Burundi et a proposé des solutions pour y faire face en posant les bases d’un État de droit, d’un développement durable ainsi que d’un modèle de société pluraliste et inclusif, caractérisé notamment par la mise en place d’un système de représentation équitable des groupes ethniques au sein des institutions burundaises.

  2. Dans l’Accord d’Arusha, le conflit burundais est qualifié de « fondamentalement politique avec des dimensions ethniques extrêmement importantes » et « découlant d’une lutte de la classe politique pour accéder au pouvoir et/ou s’y maintenir ».

  3. D’après l’Accord d’Arusha, les principales causes de la violence et de l’insécurité au Burundi sont notamment les suivantes :

L’impunité des auteurs de crimes politiques et de violations des droits de l’homme […] et la corruption ; […]

L’insatisfaction des besoins de base des citoyens résultant du sous-développement économique et de l’absence d’une bonne politique de développement […] ;

[…]

La lutte acharnée pour le pouvoir qui […] a entraîné le recours à la violence et à la manipulation délibérée des sentiments ethniques comme méthodes légitimes d’accès et de maintien au pouvoir ; Le non-respect par certains acteurs politiques des règles et principes normatifs fondamentaux de la bonne gouvernance, en particulier ceux concernant la séparation des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire ; l’indépendance de la magistrature, la satisfaction des besoins humains élémentaires, le maintien de l’ordre et de la sécurité pour tous ;

Le non-respect des traditions, des normes et principes fondamentaux du système démocratique, notamment la tolérance et le respect des droits inaliénables de la personne humaine, en particulier le droit à la vie ; La non-acceptation de la coexistence pacifique, de la diversité et du pluralisme comme principes directeurs de la vie et base de la cohésion, de l’unité et de la solidarité nationales.

  1. En dépit de restrictions aux libertés publiques, certains progrès ont été observés en 2013 dans le domaine des droits de l’homme, avec la conclusion d’accords politiques et électoraux et le retour au Burundi de membres de l’opposition en exil. L’année 2014 a vu une résurgence des tensions politiques et des entraves aux libertés publiques. En 2015, les contestations autour de la candidature de Pierre Nkurunziza à un troisième mandat de Président de la République, les violences et la polarisation de la vie politique ont entaché les élections municipales, législatives, sénatoriales et présidentielle de juin et juillet 2015, et ont eu un impact direct sur la situation des droits de l’homme, qui s’est progressivement détériorée durant toute l’année 2015.

  2. Le 30 septembre 2016, par sa résolution 33/24 sur la situation des droits de l’homme au Burundi, le Conseil des droits de l’homme a décidé, sur la base des conclusions des experts indépendants, d’établir une commission d’enquête sur le Burundi. Dans son premier rapport au Conseil, la Commission d’enquête a déterminé que des violations flagrantes et systématiques des droits de l’homme avaient été perpétrées au Burundi depuis avril 2015, principalement par des agents de l’État au plus haut niveau, dont certaines pouvaient constituer des crimes contre l’humanité.

  3. Au terme du mandat de la Commission d’enquête sur le Burundi, par sa résolution 48/16, le Conseil des droits de l’homme a décidé le 13 octobre 2021 de nommer un rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Burundi. Au paragraphe 20 de sa résolution, le Conseil charge le Rapporteur spécial de surveiller la situation des droits de l’homme au Burundi et de faire des recommandations en vue de l’améliorer, de recueillir, d’examiner et d’évaluer les informations fournies par toutes les parties prenantes en faisant fond sur le travail de la Commission d’enquête, de conseiller le Gouvernement burundais pour qu’il s’acquitte des obligations en matière de droits de l’homme mises à sa charge par les traités internationaux, et d’offrir conseils et assistance à la société civile et à la Commission nationale indépendante des droits de l’homme, qu’il aidera à s’acquitter de son mandat indépendant de promotion et de protection des droits de l’homme et à faire mieux connaître les questions relatives aux droits de l’homme.

  4. La résolution 48/16 classe le mandat du Rapporteur spécial sous le point 4 de l’ordre du jour du Conseil des droits de l’homme, c’est-à-dire celui des mandats qui requièrent son attention.

Approche méthodologique

  1. Le Rapporteur spécial conduit son mandat conformément au Code de conduite pour les titulaires de mandat au titre des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme. Il estime nécessaire de se faire une opinion par lui-même de la situation des droits de l’homme au Burundi. C’est dans cette perspective que sa mission se fonde sur une feuille de route soutenue par le vœu de revoir les autorités burundaises autour de la table des discussions et d’établir un cadre de dialogue et de coopération franc, afin de mieux faire valoir les avancées et défis du Burundi et de soutenir ses efforts.

  2. Le Rapporteur spécial s’est attelé, depuis sa prise de fonction, à comprendre l’histoire, la situation sociopolitique, le cadre juridique, l’économie et le contexte du Burundi dans la perspective d’évaluer la situation des droits de l’homme. De ce point de vue, il apparaît important d’appréhender les causes profondes de la situation actuelle. Le Rapporteur spécial a pour ce faire entrepris d’identifier les opportunités et les défis à l’effet d’étudier les voies et moyens visant à surmonter les obstacles à la protection complète et effective des droits de l’homme.

  3. N’ayant pas visité le Burundi à ce jour, le Rapporteur spécial a fondé ses analyses sur des informations officielles, les déclarations du Gouvernement, les informations reçues d’acteurs de la société civile et de défenseurs des droits de l’homme, des rapports de la communauté diplomatique, d’agences du système des Nations Unies et d’organisations internationales et régionales, des rapports du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, des rapports de la Commission d’enquête sur le Burundi, des recommandations acceptées dans le cadre de l’Examen périodique universel ainsi que celles formulées par les organes conventionnels et les procédures spéciales.

  4. Bien que le présent rapport couvre la période d’octobre 2021 à août 2022, le Rapporteur spécial énumère et analyse certains sujets de préoccupation antérieurs à la période considérée, dont les répercussions continuent d’avoir une incidence sur la situation des droits de l’homme au Burundi.