Skip to main content

Tchad : Aperçu des besoins humanitaires 2021 (mars 2021)

Countries
Chad
+ 6 more
Sources
OCHA
Publication date

Contexte de la crise

Le Tchad demeure confronté à une crise humanitaire complexe résultant des causes endogènes et exogènes et des facteurs conjoncturels et structurels qui caractérisent son contexte politique, sécuritaire, socio-économique et environnemental. L’exposition aux effets du changement climatique, l’ampleur des violences perpétrées par des groupes armés dans la région du bassin du lac Tchad, la fragilité de la situation sécuritaire dans les pays limitrophes et les conflits intercommunautaires dans un contexte de sous-développement pérennisent la situation humanitaire au Tchad.

Profils politiques et sécuritaires

Le Tchad est un Etat unitaire et laïc. L’ordonnance n°038/PR/2018 du 10 août 2018 a doté une nouvelle subdivision des unités administratives et des collectivités autonomes en 23 provinces dont celle de N’Djamena, 107 départements et 377 communes.

Le pouvoir central est représenté au niveau local par les Gouverneurs de provinces, les Préfets de département et les Administrateurs délégués auprès des communes. Ceux-ci assistent les Présidents des conseils provinciaux, des conseils communaux et le Maire de la ville de N’Djamena dans la mise en œuvre des plans et des programmes de développement. L’arrêté n° 527/PR/PM/2014 du 4 mars 2014 a mis en place un dispositif national de prévention et de gestion des crises alimentaires et nutritionnelles avec des structures déconcentrées au niveau provincial et local (les comités provinciaux d’action, les comités départementaux d’action et comités locaux d’action).

Sur le plan politique, les élections législatives initialement prévues en 2015 sont planifiées en 2021 selon le calendrier électoral publié par la Commission électorale nationale indépendante (CENI) le 7 juillet 2020 qui fixe les élections présidentielles au 11 avril 2021, les élections législatives le 21 octobre 2021 et les élections communales le 3 avril 2022. La réforme institutionnelle de 2018 a instauré la IVème République, modifiée l’organisation administrative du pays en optant pour un État unitaire décentralisé et a fixé le mandat présidentiel à six ans, renouvelable une fois, tout en supprimant le poste de Premier Ministre. La vision 2030 du développement est de faire du Tchad un pays émergent capable d’assurer la sécurité alimentaire, l’accès pour tous à l’eau potable et à l’énergie à travers plusieurs politiques et stratégies sectorielles dont le Plan national de Développement (PND 2017-2021).

L’insécurité dans les pays voisins et les défis sécuritaires internes ont augmenté le nombre de personnes en situation de déplacement (réfugiés, déplacés, retournés, etc.) ayant besoin d’une aide alimentaire au Tchad.

Sur le plan sécuritaire, le Tchad reste affecté par l'insécurité résultant de l'insurrection des groupes armés. Les attaques ciblées des villages, survenues depuis la crise de Boko haram au cours de l'année 2014 et qui se poursuivent en 2020 ainsi que les opérations militaires menées par l'armée tchadienne et les forces multinationales mixtes (FMM) ont continué d'affecter la stabilité de la zone du lac Tchad. L’attaque meurtrière de la localité de Bohoma survenue le 23 mars 2020 fait partie des attaques de grande envergure qui ont occasionné des déplacements importants de la population dans la province du Lac. En réaction à l’attaque, l’armée tchadienne a lancé une opération militaire dénommée « colère de Bohoma » et a instauré l’état d’urgence dans les départements de Fouli et Kaya le 27 mars 2020, prorogé de trois mois par l’Assemblée nationale en séance plénière du 16 avril. L’état d’urgence a instauré une zone de guerre allant de Kaiga Kindjiria - Ngouboua à Tchoukoutalia et de la zone insulaire, à l’ouest de la province du Lac, à la frontière avec le Niger et le Nigeria où la population était forcée de fuir pour éviter les effets collatéraux de la guerre. Plus de 20 000 personnes, parmi lesquelles 10 060 femmes et filles et 9 940 hommes, se sont déplacées à Diamerom, dans le département de Fouli. Parmi ces 20 000 personnes, 12 500 ont été relocalisées dans le site d’accueil à Amma, à 30 kms dans le même département. L’insécurité s’est généralisée avec l’activisme des groupes armés occasionnant de nouveaux déplacements dans la province du Lac.

La partie Nord du pays est restée affectée par l’activisme des groupes armés appartenant au comité d’auto-défense de Miski qui avait affronté l’armée tchadienne au courant de l’année 2019 avant de signer un accord de paix le 3 novembre 2019. Cet accord a été suivi par la signature des décrets de réhabilitation des cantons de Goumour I, Tiga et Odowaya, dans le département de l’Emi-Kossi, province du Borkou, qui constituait l’une des revendications dudit comité3 . Le 7 septembre 2020, ce comité a renoncé à l’accord de paix, ce qui donne voie à d’éventuels affrontements susceptibles de déstabiliser la partie nord du pays.

L’Est et le Sud du pays sont affectés par la fragilité du contexte politique et sécuritaire des pays voisins (Soudan, Libye et République centrafricaine). Les conflits intercommunautaires survenus en décembre 2019 et juillet 2020 au Darfour ouest (Soudan) ont occasionné le déplacement de plus de 16 000 personnes vers le Tchad. L’enregistrement finalisé le 12 août 2020 au camp de Kouchaguine-Moura indiquait la présence de 13 941 réfugiés répartis en 4 093 ménages. Ces réfugiés s’ajoutent à plus de 350 000 réfugiés soudanais qui sont accueillis au Tchad depuis une dizaine d’années. Le rétablissement de l’ordre politique au Soudan après la chute du président Omar el-Bechir et les accords trouvés entre groupes belligérants au Darfour pourraient encourager le processus de rapatriement des réfugiés soudanais dans leur pays. Le conflit politique en Libye a des conséquences sur la situation socio-économique, politique et sécuritaire de la sous-région. Plus de 800 personnes (dont 95% d’hommes, 5% de femmes et 3% d’enfants) retournées de la Libye sont arrivées à Ounianga Kébir au Nord du Tchad depuis la mi-avril. Les personnes déportées proviennent du nord-est de la Libye, dont 39% de Benghazi, 26% de Ejdabia et 17% de Alkufra. Ces personnes se trouvaient en Libye pour des raisons économiques et ont subi des menaces (48%), enlèvements (21%), détentions arbitraires (20%), tortures (19%) et travaux forcés (4%). Ces personnes sont en majorité d’origine tchadienne (93%) mais des Nigériens (3%), des Nigérians (3%) et des Soudanais (1%) ont également été recensés. Ces personnes arrivent au Tchad dans un état de vulnérabilité et ont exprimé des besoins alimentaires, en abris, en eau potable et articles ménagers essentiels.

La République centrafricaine continue de faire face à la fragilité sécuritaire, particulièrement dans sa partie nord où l’activisme des groupes armés, la circulation d’arme et le banditisme sont rapportés, et ce, en dépit des avancées notifiées dans la mise en œuvre de l’accord de paix signé en février 2019. La préfecture de l’Ouham Pendé au nord-ouest, à la frontière avec le Tchad, est continuellement menacée par des exactions de la part des groupes armés et des conflits opposant les agriculteurs aux éleveurs lors de la transhumance saisonnière. Une opération militaire de la MINUSCA et des forces armées nationales y est déployée depuis mai 2020 à la suite de plusieurs incursions violentes dans les villages et d’attaques contre les casques bleus. Plusieurs milliers de personnes ont été déplacées dans les préfectures de l’Ouham-Pendé et la Nana-Mambéré plus au sud. Les opérations d’enregistrement électoral ainsi que de reprise des classes ont été fortement perturbées. C’est d’ailleurs dans cette zone que, pour la première fois en RCA, des mines anti-char ont été utilisées cette année afin d’empêcher le déploiement des forces de sécurité. Cette situation reste l’obstacle au rapatriement de plus de 96 000 réfugiés centrafricains qui sont au Tchad depuis plusieurs années. L’enregistrement biométrique réalisé entre juin et septembre 2019 dans les provinces du sud relevait que seuls 29% des réfugiés centrafricains étaient favorables au retour volontaire en RCA en raison du contexte sécuritaire encore fragile. Cependant, on observe des mouvements pendulaires de certains réfugiés à la recherche des terres arables ou à des fins commerciales entre le Tchad et la RCA. Avec la mise en œuvre de l’accord de paix et le renforcement de l’état de droit dans l’ensemble du pays, la situation sécuritaire pourrait s’améliorer et ainsi enclencher le processus de retour progressif des réfugiés centrafricains vers leur pays.

UN Office for the Coordination of Humanitarian Affairs: To learn more about OCHA's activities, please visit https://www.unocha.org/.