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PB-mères : une stratégie pour mieux dépister la malnutrition en période de COVID-19

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ALIMA
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Le programme PB-mères d’ALIMA (The Alliance for International Medical Action), a connu un grand succès depuis son lancement en 2011. Il permet d’aider les mères et les soignants à détecter la malnutrition chez les enfants à un stade précoce. Dans le contexte de la pandémie de COVID-19, cette approche révèle d’autant plus sa pertinence.

« Chaque année, la malnutrition des enfants est une urgence et les perturbations dues à la COVID-19 aggravent la situation », explique Kevin Phelan, conseiller en nutrition pour ALIMA.

Depuis l’arrivée de l’épidémie sur le continent africain, des campagnes de dépistage de masse de la malnutrition ont été annulées afin d’éviter les grands rassemblements et pour respecter les mesures barrières. De nombreux centres de santé n’ont pas la capacité de faire du porte-à-porte pour dépister individuellement les enfants atteints de malnutrition, et de nombreuses familles sont réticentes à se rendre dans les centres de santé, par peur d’être infectées par le coronavirus. Cela a été observé au moins au début de la pandémie. Pour toutes ces raisons, les bracelets tricolores PB-mères, simples à utiliser pour les mamans, se révèlent essentiels pour identifier les enfants malnutris.

Voir la vidéo explicative du projet PB-mères ALIMA

« Les mères sont souvent effrayées ou dans l’incapacité d’amener leurs enfants dans un centre de santé, par peur de contracter la COVID-19. De plus en plus, elles comptent sur ces bracelets PB-mères pour dépister la malnutrition chez leurs enfants, depuis leur domicile », confie Dr Ibrahim Kandian Diallo, responsable programmes pour ALIMA.

En effet, c’est uniquement si le bracelet, qui mesure le périmètre brachial (PB) de l’enfant, est jaune ou rouge, que se confirme un état de malnutrition aiguë modérée ou sévère. Dès lors, les parents doivent se rendre dans un centre de santé afin d’obtenir un traitement contre la malnutrition de leur enfant.

Une double crise

En 2020, dans les centres de santé soutenus par ALIMA, nos équipes ont constaté une diminution de 38% de la fréquentation par rapport à 2019. Parallèlement, le nombre d’enfants admis en état de malnutrition modérée ou sévère a augmenté dans la plupart des pays où ALIMA intervient.

Au Niger, par exemple, le taux de malnutrition modérée dans les unités de nutrition ambulatoire a augmenté de 30% dans certaines régions. Cette situation est probablement un dommage collatéral de la pandémie qui a globalement augmenté les niveaux d’insécurité alimentaire, suite à la fermeture de marchés et à une réduction du revenu moyen des ménages. Même dans les zones où les marchés restent ouverts, de nombreuses familles n’ont plus les moyens d’acheter des aliments nutritifs ou bien sont contraintes de limiter les rations des repas.

« La COVID-19 a incontestablement exacerbé la précarité des populations à travers le monde, en particulier les plus vulnérables », déclare le Dr Moumouni Kinda, directeur des opérations chez ALIMA. « La réponse à la pandémie a également alourdi la charge de travail des agents de santé. »

Lire «Covid-19 en Afrique: alerte malnutrition!», la tribune du Dr Moumouni Kinda.

Les activités de promotion de la santé dans les communautés, notamment les campagnes de sensibilisation, d’éducation sanitaire et de vaccinations ont très largement diminué. De plus, les fermetures des frontières et les changements dans les chaînes d’approvisionnement ont entraîné des retards et des interruptions dans la livraison des fournitures médicales et des médicaments essentiels. Cela rend encore plus difficile le traitement des enfants souffrant de malnutrition dans les zones reculées. Parfois, il n’y a tout simplement pas assez d’aliments thérapeutiques prêts à l’emploi à donner aux enfants malnutris.

« Un très grand nombre d’enfants souffrent actuellement de malnutrition aiguë sévère, mais malheureusement, les structures de santé locales ont une capacité limitée pour les dépister. Les traitements pour les soigner sont également en quantités insuffisantes », explique le Dr Oumarou Maidadji, responsable programmes pour ALIMA. « Cela crée un besoin urgent de poursuivre la mise en œuvre d’approches simples et efficaces, telles que l’utilisation du bracelet PB-mères, afin d’identifier ces enfants le plus tôt possible, lorsqu’il est moins coûteux et plus facile de les soigner. »

Une approche efficace

L’approche PB-mères a été lancée par ALIMA et son partenaire nigérien BEFEN (Bien-Être des Femmes et des Enfants au Niger) dans la région de Zinder au Niger en 2011. Cette approche innovante s’avère très prometteuse, en particulier dans les zones difficiles d’accès.

Une première étude en 2013 a montré que les mères étaient tout aussi compétentes que les agents de santé pour détecter la malnutrition chez leurs enfants. Une étude de suivi plus large a comparé la stratégie de dépistage de la malnutrition par les mères (PB-mères) à la stratégie de dépistage par les agents de santé communautaires.

Dans la zone de santé de Zinder, 13 000 mères ont appris à utiliser le bracelet PB-mères. Leurs enfants malnutris détectés par leur maman ont pu arriver au centre de santé à un stade moins avancé de la maladie et ont moins de chance d’être hospitalisés que ceux qui ont été dépistés par les agents de santé communautaires.

« Je suis très reconnaissante car ALIMA m’a appris à mesurer le bras de mon enfant », déclare Fatima Modu, qui vit dans le camp de personnes déplacées de Muna, dans l’État de Borno au Nigeria. « Je garde le bracelet avec moi tous les jours. Je l’utilise à la maison en mesurant le bras de mon enfant, et c’est particulièrement utile pendant cette période de COVID-19. »

À ce jour, ALIMA et ses partenaires locaux ont formé plus de 2 millions de mères à travers l’Afrique subsaharienne à l’utilisation du bracelet PB-mères.

Désormais, cette approche est utilisée dans 26 pays à travers le monde et appliquée par 12 organisations, dont l’UNICEF et le Programme alimentaire mondial.