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Afrique de l'Ouest Alerte sur la sécurité alimentaire, 12 décembre 2019

Countries
Burkina Faso
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Sources
FEWS NET
Publication date
Origin
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Urgente nécessité de renforcement de l'assistance et de l'accès humanitaires dans le centre de l'Afrique de l'Ouest touché par les conflits

La forte recrudescence des conflits depuis la mi-2018 (Figure 1) dans la région du Liptako-Gourma, qui englobe l'ouest du Niger, le nord et l'est du Burkina Faso, le centre et le nord-est du Mali, a entraîné le déplacement de près de 700 000 personnes et a considérablement perturbé les activités commerciales et de subsistance. On s'attend à ce que les conflits continuent de faire grimper les besoins d'aide humanitaire en 2020. Selon les estimations actuelles, entre 1,5 et 1,7 million de personnes sont en Crise (Phase 3 de l’IPC) ou pire dans la région. On s'attend à ce que les besoins passent à 2,5 à 3,5 millions de personnes pendant la soudure de juin à août 2020, soit une augmentation de 50 pour cent par rapport à l'an dernier. Il est urgent d'intensifier l'aide humanitaire et d'assurer sans entraves l’accès à l'aide humanitaire afin de répondre aux besoins élevés actuels et futurs.

Depuis le début de l'année, le projet ACLED (Armed Conflict and Location Event Data Project) a enregistré près de 1 300 conflits dans la région du Liptako-Gourma, faisant 3 493 morts. La plupart de ces événements se sont déroulés au Burkina Faso, avec environ 600 conflits dans les 26 provinces de la région du Liptako-Gourma. Plus de 486 000 personnes ont été déplacées au Burkina Faso, près de 80 000 au Niger et plus de 110 000 au Mali. En outre, environ 76 000 réfugiés originaires de la région du Liptako-Gourma ont fui vers les pays voisins.

L'insécurité et les déplacements de population qui s’en est résulté, ont forcé de nombreux ménages à abandonner leurs champs ou d’y avoir un accès limité pour la culture et la récolte. Selon les estimations préliminaires de la Direction nationale des statistiques agricoles du Niger, la production des cultures de base dans la région de Tillabéry au Niger sera jusqu'à 40 pour cent inférieure à la moyenne dans les départements les plus touchés par les conflits. Sur la base des estimations de la production agricole au niveau national, FEWS NET s'attend à ce que les productions agricoles dans les zones les plus touchées par les conflits aient une production jusqu'à 75 pourcent inférieures à la moyenne au Burkina Faso et jusqu'à 35 pour cent inférieures à la moyenne au Mali. Les résultats de l'Enquête nationale sur la sécurité alimentaire et la nutrition (ENSAN) d'octobre 2019 et des enquêtes sur les sites sentinelles au Niger indiquent que dans de nombreuses zones de la région du Liptako-Gourma, plus de 20 pour cent des ménages interrogés (populations locales, personnes déplacées et réfugiés) ont déclaré s’être engagés dans des activités de vente ou d'exploitation d'actifs productifs ou d'activités illicites, qui constituent une stratégie de survie indiquant la Crise (Phase 3 de l’IPC) ou pire. Cette situation est confirmée par des informations relatives à la consommation alimentaire nettement détériorée.

En réponse à la montée des conflits, les gouvernements ont mis en place des mesures de sécurité qui limitent les déplacements pastoraux typiques et l'accès aux pâturages et aux sources d'eau habituelles ainsi que le fonctionnement normal des marchés. Il en résulte une concentration des pasteurs près des agriculteurs, ce qui exacerbe les tensions communautaires et les risques de conflits. La structure et le fonctionnement général des marchés sont également affectés négativement, car l'insécurité civile limite la présence de nombreux acteurs sur les marchés, y compris les commerçants des pays voisins. Cette crise sécuritaire a aussi réduit la disponibilité des biens de consommation sur les marchés ainsi que la demande en produits agricoles de rente et de bétail et perturbé l'animation générale des marchés. Dans la région de Tillabéry au Niger, cinq des douze marchés clés ont récemment connu des perturbations importantes. Certains marchés de référence, de taille moyenne à grande, situés le long de la frontière du Mali et Burkina Faso, dans les régions de Mopti (Mali) et du Sahel (Burkina Faso), et le long de la frontière entre le Mali et le Niger dans la région de Menaka (Mali), connaissent d'importantes perturbations qui limitent leurs activités. Les petits marchés le long de la frontière connaissent également des niveaux très élevés de perturbation et certains ont même cessé de fonctionner.

Les conflits dans la région devraient continuer à provoquer des déplacements de population et à perturber l'accès des ménages à la nourriture et aux revenus. Il est possible que cette situation se détériore d’avantage au milieu ou à la fin de l'année 2020 en raison de l'épuisement des ressources limitées en pâturages et en eau ainsi que des restrictions imposées aux déplacements des pasteurs. De plus, l'épuisement précoce des stocks de cultures de certains ménages au cours de cette période entraînera des niveaux plus élevés d'insécurité alimentaire aiguë. FEWS NET estime qu'entre 2,5 et 3,5 millions de personnes seront probablement en Crise (Phase 3 de l’IPC) ou pire dans la région du Liptako-Gourma entre juin et août 2020. Les régions les plus préoccupantes sont les provinces du Soum, Oudalan, Loroum, Bam, Sanmatenga, Séno, Yagha et Komondjoari au Burkina Faso, les départements de Tillabéry, Flingué, Téra, Torodi et Gotheye au Niger, la région de Ménaka et les cercles d'Ansongo, Gourma Rharous, Douentza, Koro et Bankass au Mali.

Les informations disponibles indiquent que l'aide alimentaire humanitaire se poursuit dans certaines parties du Burkina Faso, bien que la distribution soit souvent interrompue par l'insécurité et ne soit pas, par conséquent, régulière. L'aide alimentaire humanitaire devrait reprendre comme à l'accoutumée au Mali et au Niger pendant la période de soudure, même si les besoins d'aide devraient être plus importants que ce qui est actuellement prévu. Compte tenu de la probabilité d'une poursuite du conflit, des besoins d'aide humanitaire déjà élevés mais qui vont augmenter jusqu'à la fin de 2020, il est urgent d'intensifier l'aide et de faciliter l’accès humanitaire sans restriction pour assurer une bonne couverture des besoins.