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Le Nexus Humanitaire-Développement au Regard du Grand Bargain

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Groupe URD
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En mai 2016, le Sommet humanitaire mondial a appelé à un changement dans la gestion, la planification et la mise en œuvre de l’action humanitaire. Dans son rapport Une seule humanité, des responsabilités partagées 1 , en amont de ce sommet, le Secrétaire général des Nations unies a lancé un appel mondial afin de « changer la vie des gens : passer de la fourniture de l’aide à la fin des besoins ». Il insiste pour que les Objectifs du Développement Durable, à atteindre en 2030, ne délaissent personne et fait référence à la mise en place d’un cadre de travail commun entre les acteurs humanitaires et ceux du développement afin d’assurer au mieux la sécurité, la dignité et la capacité de s’épanouir des populations vulnérables et des populations les plus à risque.

Au cours de ce Sommet humanitaire mondial, 18 bailleurs de fonds et 16 organisations internationales de l’aide d’urgence (agences onusiennes, ONG internationales et Mouvement de la Croix-Rouge) ont signé The Grand Bargain – A shared Commitment to Better Serve People in Need2 , rapport qui décrit 51 engagements mutuels pour atteindre dix objectifs destinés à accroître l’efficacité de l’aide d’urgence. Le dixième objectif de cette « Grande négociation » consiste à renforcer le lien entre acteurs humanitaires et du développement, à agir pour une meilleure collaboration au-delà des frontières institutionnelles, toujours dans le respect des principes humanitaires, et particulièrement dans les situations de fragilité et de crises prolongées3 . Cet objectif se décline lui-même en cinq engagements que nous détaillerons dans l’analyse ci-dessous.

Il faut toutefois rappeler que la réflexion et le travail autour du nexus humanitaire-développement n’est pas nouveau : il y a vingt ans déjà, le Groupe URD, avec la collaboration d’ONG d’urgence et de développement, publiait l’ouvrage Entre urgence et développement 4 qui montrait, entre autres, l’importance d’associer les organisations spécialistes des deux approches.

La nécessité d’améliorer la coopération entre acteurs humanitaires et du développement est reconnu au sein des Nations unies depuis quelques années maintenant. L’adoption, en 2006, du cadre de travail Delivering as One5 était une première étape pour amener les acteurs du développement à coopérer avec les humanitaires. De leur côté, les humanitaires ont été appelé à renforcer l’action collective en 2005 avec l’adoption de l’approche Cluster du Inter-Agency Standing Committee. Dans cette structuration, deux dynamiques contradictoires ont émergé autour du concept de « relèvement précoce » et de son cluster dédié. En effet, ce cluster devait à la fois promouvoir le lien urgence-développement dans tous les clusters spécifiques (santé, eau, etc.) et mettre en place des activités spécifiques pouvant favoriser ce lien (travail avec les institutions de l’état, déminage, etc.)6 .

Pour une compréhension claire de l’historique sur ce lien, on peut se référer à l’étude The Continuum of Humanitarian Crises Management: Multiple Approaches and the challenge of Convergence7 . Elle s’interroge sur la suite donnée aux réponses aux crises humanitaires et compare différentes approches du lien urgence-développement en s’appuyant sur le travail effectué autour de la réduction des risques de désastres et de la construction de la paix. Tout en décrivant ses avantages et ses inconvénients, les auteurs présentent un modèle d’activités à partir d’une compréhension simple et commune du concept vers laquelle tous les acteurs peuvent se rassembler.

Depuis quelques années, la complexification des crises a renforcé la prise de conscience, au sein de tout le secteur de l’aide, qu’une réforme en profondeur est fortement nécessaire, impliquant notamment le chevauchement entre les actions de court et long terme. Cela suppose un changement de paradigme vis-à-vis des pratiques actuelles et plus traditionnelles de l’aide, de nouveaux partenariats entre différents types d’interventions pour répondre aux objectifs de développement, de sécurité et de paix8 . Telle est l’ambition des signataires du Grand Bargain, et nous verrons maintenant quelles avancées ont été menées depuis 2016. Notons tout de même qu’un groupe de travail a été mis en place pour suivre la mise en œuvre de ces 5 engagements.

Hélas, il a été clos en mars 2018, à la demande des co-conveners (PNUD et Danemark). En effet, peu d’actions collectives avaient été mises en place mais les participants regrettent cette décision et s’inquiètent quant aux modalités de poursuite de la réflexion sur cet enjeu important.