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« Le financement pour prévenir le choléra est crucial pour avancer dans le développement de Haïti » - UNICEF

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Haiti
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22 août 2016 – Le Secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, a déclaré que l’ONU avait une responsabilité morale d’aider Haïti à surmonter l’épidémie de choléra et à construire des systèmes d’eau, d’assainissement et de santé solides.

« L’Organisation des Nations Unies a l’intention d’intensifier son appui pour réduire, et au final mettre fin à la transmission du choléra, pour améliorer l’accès aux soins et aux traitements et pour résoudre les problèmes à long terme des systèmes d’eau, d’assainissement et de santé en Haïti », a dit le porte-parole du Secrétaire général dans une déclaration à la presse publié le 19 août.

Malgré des appels répétés, ces efforts ne bénéficient pas de financements suffisants et le Secrétaire général a exhorté les États membres à démontrer leur solidarité avec le peuple d’Haïti en augmentant leurs contributions pour éliminer le choléra et fournir une assistance aux personnes touchées.

Le Centre d’actualités de l’ONU a récemment eu un entretien avec le Représentant du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) en Haïti, Marc Vincent, sur les actions menées sur le terrain.

Centre d’actualités de l’ONU: Quels progrès ont été réalisés dans la lutte contre le choléra en Haïti?

Marc Vincent : En termes de progrès, je pense que nous avons parcouru un long chemin mais il y a encore un long chemin à parcourir. En ce qui concerne l’UNICEF, nous sommes actifs dans environ 120 communautés et quelques 20.000 personnes dans le pays ont la possibilité de vivre maintenant dans un environnement sans défécation en plein air. En ce qui concerne les mesures de réaction rapide au choléra ici, je pense que les mécanismes mis en place ont très bien réussi à contrôler la maladie et l’ont fait passer d’un pic de 350.000 cas suspects en 2011 à 36.000 l’an dernier.

Ainsi, lorsque vous visitez trois des 16 collectivités prioritaires dans le sud-est du pays et que vous voyez combien les gens sont fiers d’avoir leurs propres toilettes, de les avoir construits eux-mêmes, et de protéger leurs familles et leurs enfants. Quand vous voyez cette fierté, cela vous donne de l’espoir. Au niveau personnel, c’est l’expérience la plus enrichissante.

Mais ce que nous voudrions faire c’est éliminer complètement le choléra. Cela signifie que nous devons continuer à travailler sur les mécanismes de réponse rapide et que nous devons nous assurer que l’accès à long terme à l’assainissement et à l’eau couvre finalement tout le pays. Mais la campagne nationale d’assainissement est un programme de développement et il faudra du temps pour changer les comportements et assurer un accès universel. Aussi, dans l’intervalle, nous avons vraiment besoin de maintenir les mécanismes de réponse rapide en place.

Centre d’actualités de l’ONU : Quelles approches l’ONU a-t-elle adoptées pour lutter contre la maladie?

Marc Vincent : Nous avons adopté des approches fondées sur le court terme, le moyen terme et le long terme. L’approche à court terme est en grande partie une réponse de crise, consistant à soutenir un système de réponse et d’alerte rapide au niveau communautaire. Quand un cas de choléra est identifié, une alerte est envoyée et une équipe d’intervention rapide se rend dans la famille affectée et met en place un « cordon sanitaire » pour décontaminer l’endroit, chlorer l’eau et donner des conseils à la famille sur les mesures de prévention nécessaires, et aussi pour distribuer des comprimés de chloration et des sels de réhydratation. Ceci est lié à d’autres éléments de la réponse rapide, comme la coordination entre les partenaires dans chaque département et l’analyse épidémiologique, afin de nous assurer que nous suivons la maladie.

La réponse à long terme est d’améliorer l’accès à l’eau et à l’assainissement pour tous les Haïtiens. À ce stade, 28% de la population a accès à des installations sanitaires adéquates et 58% a accès à de l’eau potable. Nous essayons d’accroître l’accès à l’eau potable et de changer le comportement en termes de défécation en plein air, qui est l’une des principales sources de contamination du système d’adduction d’eau. Le bacille Vibrio choléra se transmet en effet par l’eau. Donc, si tout le monde a des toilettes et que nous pouvons éliminer la défécation en plein air, nous serons en voie de réduire la transmission du choléra dans le pays. La réponse à moyen terme est une combinaison d’efforts destinés à améliorer la chloration dans les zones urbaines et rurales et améliorer l’accès à l’eau. De plus, nous sommes en train de planifier une campagne de vaccination à un niveau plus important pour renforcer l’immunité de la population contre le bacille Vibrio choléra.

Centre d’actualités de l’ONU : Quelles sont les interventions dites WASH et pourquoi sont-elles importantes?

Marc Vincent : WASH est l’acronyme en anglais pour eau, assainissement et hygiène. Le choléra est l’une des nombreuses maladies d’origine hydrique. Les maladies d’origine hydrique, notamment la diarrhée, sont la deuxième cause majeure de mortalité chez les enfants en Haïti. Les actions WASH sont destinées à améliorer l’accès à l’eau potable et l’accès à des installations sanitaires, ainsi qu’à changer les comportements. Il faut du temps pour sensibiliser les gens aux risques de défécation en plein air.

Centre d’actualités de l’ONU : La campagne d’assainissement total a été lancée il y a quelque temps. Comment se passe-t-elle?

Marc Vincent : La campagne a été lancée par le Premier Ministre et le Secrétaire général Ban Ki-moon en 2014. Elle cible initialement 16 collectivités prioritaires, identifiées en fonction de la persistance du choléra. La campagne concerne l’accès à l’eau, la réhabilitation des réseaux d’eau et la chloration pour lutter contre la contamination. En même temps, nous aidons également les communautés à construire des toilettes et à réduire la contamination de l’eau par défécation en plein air.

Nous avons constaté qu’il est très important que ces communautés construisent elles-mêmes les toilettes, car elles sont plus susceptibles de continuer à les utiliser et de comprendre leur signification. Nous travaillons également avec les écoles pour améliorer l’accès aux systèmes d’eau et d’assainissement. Les enfants en Haïti sont les agents du changement. Lorsque nous parlons aux enfants dans les écoles et que nous leur expliquons les défis du choléra, ils rentrent chez eux et l’expliquent à leurs parents. Par conséquent, vous créez une plus grande prise de conscience. De plus, nous utilisons la communication pour changer les comportements et pour faire en sorte que les gens comprennent pourquoi ils ont besoin d’avoir des toilettes, pourquoi cela est important pour leurs enfants et comment cela va sauver des vies.

Centre d’actualités de l’ONU : Quels sont les liens entre la réponse rapide et la réponse à long terme?

Marc Vincent : Nous devons tous travailler ensemble pour résoudre la question du choléra, mais aussi apporter de l’eau propre à tous les enfants en Haïti. Nous avons d’excellents partenariats avec la DINEPA (Direction nationale de l’eau propre et de l’assainissement) et le Ministère de la santé, et nous avons de très bonnes relations avec les bailleurs de fonds tels que la Banque mondiale, l’Agence espagnole de coopération et la Banque interaméricaine de développement. Maintenant, il est important que nous soyons tous d’accord sur les priorités et que nous ayons tous pour objectif premier ces 16 collectivités prioritaires et assurions vraiment une bonne couverture. Un cas de choléra en Haïti, c’est un de trop. Un enfant qui meurt du choléra, c’est un de trop. Nous avons vraiment besoin d’éliminer cette maladie. Cela est évitable avec un financement adéquat. Avec un bon programme en place, nous avons vraiment de bonnes chances d’y arriver.

Centre d’actualités de l’ONU : Vous parlez de ‘financement adéquat’. Quelle est son importance pour le long terme?

Marc Vincent : L’un des défis auxquels nous sommes confrontés est le financement des mécanismes de réponse rapide. Nous avons besoin d’un financement prévisible. Puisque le financement humanitaire est de courte durée, il est donc difficile de savoir d’une année sur l’autre combien d’argent nous sommes en mesure de planifier. Nous espérons mettre la réponse rapide dans une position de développement à long terme. Alors, beaucoup de ces mécanismes peuvent être utilisés pour prévenir les maladies d’origine hydrique et d’autres maladies contagieuses. Par conséquent, l’un des défis que nous avons est de mobiliser des fonds de développement afin de maintenir ces mécanismes en place et renforcer les capacités du Ministère de la santé.

Centre d’actualités de l’ONU : Du point de vue de l’UNICEF, dans quelle mesure l’investissement dans l’eau et de l’assainissement pour prévenir le choléra et d’autres maladies transmises par l’eau peut-il avoir un effet d’entraînement dans d’autres domaines au-delà de la santé?

Marc Vincent: L’accès à l’eau et à l’assainissement affecte beaucoup d’autres domaines dans la vie d’un enfant et des communautés haïtiennes en général. Si vous avez de l’eau propre, cela vous permettra de réduire le nombre de maladies d’origine hydrique, vous ferez la promotion de bonnes pratiques d’hygiène, et cela vous permettra de réduire le taux d’absentéisme scolaire. Depuis 2010, plus de 700 enfants sont morts du choléra et plus de 100.000 ont été touchés. Si vous comptez quatre jours d’école en moins pour chaque cas suspect, nous parlons de centaines de milliers de jours d’école perdus en Haïti. Donc, cela a un impact sur l’éducation, cela a un impact sur la nutrition. Il existe de nombreux avantages à améliorer l’accès à l’eau potable et à l’assainissement. Cela est crucial pour le développement.